Le Blog de la guerre d'algérie, texte inédit, photos rare, des vidéos et interactions
Les services spéciaux égyptiens menèrent une rapide enquête. La mort était suspecte. Le jeune homme se serait jeté dans le vide depuis la fenêtre d’un bureau des services de Boussouf le grand patron du renseignement et l’un des principaux responsables, de la mort d’Abane. Ben Aouda, ancien lieutenant de Ben Tobbal en wilaya 2, était présent et garantissait la version du suicide. Ferhat Abbas soutenait de son côté cette hypothèse, rappelant le caractère «névrosé» d’Allaoua et racontant la scène qui les avait opposés.
Il n’en fallait pas plus pour qu’une nouvelle fois les clans s’affrontent. Le docteur Lamine Debaghine, qui n’avait pas «digéré» l’éviction de sa candidature à la présidence du G.P.R.A., prit la tête des accusateurs, soutenu dans cette direction par les Services spéciaux égyptiens toujours prêts à aider un clan sur lequel ils aient barre. Il fit remarquer que la chambre du «suicidé» avait été fouillée de fond en comble. Les doublures des valises coupées au rasoir. Que cherchait-on? Qui cherchait quoi? Le jeune homme avait-il en sa possession des documents qui permettes de reconstituer les circonstances de la mort d’Abane, confirmées par les témoins survivants? Nul ne le saura jamais.
La réunion exceptionnelle du G.P.R.A, fut houleuse. On profita de l’affaire Allaoua pour se jeter à la figure les griefs éternels. Une nouvelle fois les civils -divisés en deux clans (Abbas et Lamine)- reprochaient aux colonels d’accaparer le pouvoir sous prétexte qu’ils représentaient les maquisards. Ahmed Francis, compagnon de route de Ferhat Abbas à l’époque de l’U.D.M.A., résuma leur position en prenant à partie les 3B, Belkacem Krim, Ben Tobbal, Boussouf.
«Vous avez imposé au G.P.R.A, un groupe de super-ministres qui sont les colonels, reprocha-t-il. On a fait la guerre en Algérie pour supprimer le deuxième collège! Eh bien, moi, je ne tolérerai pas plus longtemps d’être au sein du gouvernement provisoire autans que ministre du deuxième collège! Tout cela doit changer. Tout cela va changer!».
C’était une allusion directe à la venue à l’extérieur des plus durs des maquisards de l’intérieur: Amirouche, chef de la wilaya 3, Si Haouès, chef de la wilaya 6 auxquels se joindraient peut-être Si Lakhdar et Si M’hamed, patron de l’Algérois. Les chefs de l’intérieur demanderaient dés comptes aux « révolutionnaires de palace » et voudraient savoir pourquoi les maquis n’étaient alimentés ni en armes ni en argent, alors que des dépôts immenses se constituaient aux frontières. Bien que leur présence soit loin d’être approuvée par un homme comme Amirouche, les politiques du G.P.R.A, et, dans une certaine mesure, quelques militaires comme Mahmoud Chérif espéraient bien reprendre, à la faveur de la bagarre qui s’annonçait, un peu de ce pouvoir que les 3B tenaient entre leurs mains implacables. La réunion des colonels, décidée en prélude au 3e C.N.R.A, fixé à la fin de l’année à Tripoli, s’annonçait tumultueuse. Et Amirouche qui, par radio, venait de prévenir Tunis de son arrivée prochaine à l’extérieur n’avait pas caché son mécontentement!
Malek benabi souligne dans son témoignage que l’assassinat au siège du GPRA au Caire en février 1959 du jeune Amirat Allaoua, eut lieu après avoir ébruité, au retour de Beyrouth, des contacts douteux qu’avait Ferhat Abbas. Le chef du G.P.R.A. quand a lui, il consacre moins d'une ligne a cette affaire.